Le fret ferroviaire et les ports français souffrent en silence
Alors que se profile une nouvelle journée de grève contre la réforme des retraites jeudi prochain, la onzième depuis le début du mouvement le 19 janvier, je ne peux pas m’empêcher de penser à tous ces patients et louables efforts partis en fumée, que ce soit en matière de compétitivité des ports ou de report modal vers le ferroviaire. Il ne s’agit pas ici de remettre en cause le droit légitime de faire la grève, mais d’en déplorer, tout aussi légitimement me semble-t-il, certaines conséquences peu médiatisées pour l’économie, la compétitivité, et l’empreinte CO2 de notre pays. Comment ignorer en effet ce phénomène de « report modal inversé » aux effets néfastes -économiques comme écologiques- qui pousse depuis deux mois et demi de nombreuses entreprises adeptes du fret ferroviaire (conventionnel ou transport combiné) à se tourner, sans autre choix, vers du transport routier ? Quant aux opérations « ports morts », aux grèves perlées de diverses professions liées au fret maritime, et aux blocages de ronds-points ou d’accès aux ports, ils ne touchent pas que l’approvisionnement des raffineries ou les activités de pêche : cela entraîne aussi le transfert de milliers de conteneurs vers des places portuaires de nos voisins du Nord et du Sud de l’Europe comme Rotterdam, Anvers ou Valence. Et pour les autres, ceux dont les conteneurs maritimes sont en attente de chargement ou de déchargement, c’est la double peine : non seulement ils doivent subir des retards importants, mais en plus ils sont facturés par les compagnies maritimes et les terminaux de frais d’immobilisation dont ils ne sont aucunement responsables ! Résultat, c’est une perte de compétitivité et une baisse de la disponibilité des produits pour les entreprises qui misaient sur les ports français ou sur l’avenir du transport ferroviaire. Sans oublier l’effet négatif sur la dynamique de réduction de l’impact environnemental du transport de fret. Jean-Luc Rognon