Décidément, comme les espèces d’êtres vivants, les entreprises et leur supply chain ne sont pas des entités immuables. Au-delà de leur stratégie propre, on les voit évoluer avec le temps et en fonction du contexte extérieur, des contraintes et des pressions auxquelles elles sont soumises, qu’elles soient d’ordre économique, technologique, sociologique, réglementaire, et bien sûr environnemental. D’ailleurs, il est très courant d’invoquer la théorie darwiniste de sélection naturelle pour prévenir que seules les organisations les plus agiles et les plus résilientes conserveront toutes leurs chances de survie sur le long terme. Mais on pourrait aussi bien faire référence au transformisme, une théorie biologique antérieure – un peu oubliée – énoncée au début de xixe siècle par Jean-Baptiste Lamarck. Il était le premier à défendre l’idée d’une adaptation des systèmes vivants en réaction aux contraintes et aux influences du milieu.
Pourquoi me direz-vous aller déterrer cette antique théorie du transformisme, au-delà du côté chauvin et made in France ? Tout simplement parce que le terme transformation figure aujourd’hui en très bonne place dans le lexique des mots incontournables de la stratégie des entreprises. Dans le langage courant des managers, une transformation est un projet d’envergure qui va impliquer des changements à plusieurs niveaux, dans l’organisation, les processus métier, les outils technologiques, la formation des collaborateurs. Et chez les consultants, il est accommodé littéralement à toutes les sauces : transformation supply chain, transformation digitale, transformation IT, transformation énergétique, et j’en passe.
Pour ceux qui en viendraient à douter du pragmatisme et du côté concret de ce genre de grands projets, ce numéro de rentrée de Supply Chain Magazine devrait les rassurer. Vous y découvrirez de nombreux témoignages sur trois types de transformation : celle des schémas directeurs industriels dans le dossier sur les relocalisations, celle des magasins, promus acteurs à part entière de la supply chain dans l’enquête retail, et celle de la nouvelle génération de logistique urbaine, dans notre zoom consacré au Forum d’été. On notera que ces trois problématiques ont en commun d’être fortement orientées client, tout en entretenant un lien très étroit avec les objectifs RSE. Et vous le savez mieux que moi : dans chacune de ces transformations stratégiques, les responsables supply chain jouent les premiers rôles !